imagehmorganlettrine2Pays de l’ambivalence et de la contradiction, le Brésil aura beaucoup souffert pour servir la religion mondiale du football. Le prix payé pour être au devant de la scène sportive internationale (et hypocritement attirer les entreprises et investisseurs économiques) est exorbitant compte tenu des besoins, des manques, des retards en tous domaines… Prix, bien sûr, qui touche les plus pauvres. Ainsi les favelas de Rio de Janeiro sont considérées par les pouvoirs publics comme des réserves foncières qu’ils mobilisent activement aujourd’hui afin d’y réaliser une multitude d’aménagements urbains pour préparer la ville à accueillir la Copa et les Jeux olympiques. La favela Metro est ainsi passée sous le bulldozer afin de réaliser un parking pour le Maracanã, à la place de la Vila Autodromo on a construit le Centre des médias et d’entraînement olympique, la Vila Harmonia a disparu au profit de l’élargissement d’une avenue…
Démunis parmi les plus démunis, les indiens – qui peinent toujours à être reconnus comme citoyens à part entière, malgré les discours officiels – sont les premières victimes (symboliques) de la mégalomanie gouvernementale comme le montre cet article d’Elsa Leydier.
« Épuisés – Esgotados.image
En février 2014, la poste brésilienne édite 600 000 timbres à l’effigie de la Coupe du monde de football. En quelques jours, la totalité des 600 000 timbres est vendue sur internet et dans les bureaux de poste. À Rio de Janeiro, tout près du stade Maracanã, où se dérouleront la plupart des événements de la Coupe du monde de football pendant l’été, se trouve l’Antigo Museu do indio. C’est l’unique lieu du pays dédié aux cultures indigènes, un lieu qu’occupaient des Indiens de différentes communautés depuis des années. Ils y revendiquaient la richesse de leurs cultures en y pratiquant et enseignant leur artisanat et leurs techniques thérapeutiques. L’endroit était aussi un lieu d’accueil pour les Indiens issus de toutes les communautés qui se rendaient à Rio de Janeiro. En mars 2013, après des mois de lutte, les Indiens qui occupaient l’édifice ont été violemment chassés de l’Antigo Museu do indio par la police militaire. Cela dans le but de détruire le bâtiment afin de laisser place à un complexe de restaurants, de parkings et de boutiques vendant des produits dérivés de la Coupe du monde. Aujourd’hui, après plus d’un an d’affrontements, d’incertitudes et de pro-messes rompues, l’Antigo Museu do indio a pu, pour l’instant, être protégé de la destruction et reste debout… encerclé de parkings. Les Indiens n’ont plus aucun droit d’accéder à la zone. »

Elsa Leydier, Le Tigre, juin 2014.

Illustrations: photographies d’Elsa Leydier.

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Patrick Corneau