J’aime regarder la merveilleuse série des Maigret adaptée pour la télévision avec l’imposant et subtil Bruno Crémer dans le rôle titre. Un régal pour comprendre une certaine France pérenne entre relent de Gauloise éteinte et odeur de verveine un peu passée… Lundi dernier j’ai dérogé et suis allé voir du côté du FBI et de ses « portés disparus » sur France2. Si comparaison n’est pas raison, quelques éléments relevant du « formatage » d’un produit-phare de l’hyperindustrialisation culturelle américaine m’ont frappé:
– la durée: 40 minutes (deux fois plus court qu’un épisode de la série des Maigret) correspond au temps de conscience moyen disponible d’un cerveau états-unien entre deux génériques…
– le scénario entremêle les petites affaires privées des agents (coucheries, tromperies, divorces, soucis avec les enfants…) aux enquêtes: on humanise ces experts du crime en imperméable noir corbeau en en faisant des « hommes et des femmes comme les autres », c’est-à-dire comme vous et moi, téléspectateurs.
– L’enquête avance non pas par la sagacité des agents spéciaux, gens sérieux aux capacités sobrement professionnelles, mais grâce au traitement de l’information contenue dans de gigantesques bases de données interconnectées (FBI, police fédérale et criminelle, fichiers d’identification génétique, etc.) et accessible – « high tech » oblige – d’un clic de souris… Vous êtes tous fichés!
– Les transitions entre les scènes pour des déplacements dans le temps (« flash-back » explicatif) ou l’espace (changement de lieu selon l’avancée de l’enquête) sont de courts plans – quasi subliminaux – de vues aériennes en plongée, proches des images de surveillance satellitaire (syndrome Google Earth): où que vous soyez, nous vous observons…
Je ne parlerai pas du contenu, aussi vite oublié que vu.
J’attends avec impatience le prochain Maigret (même si c’est une rediffusion). Les doutes, hésitations, incertitudes « terriblement humains » qu’enveloppent les volutes de la pipe du commissaire amateur de blanquette de veau me rassurent.
Illustration: couverture et illustration de l’édition originale (1947) de La pipe de Maigret, Paris, Presses de la Cité.
Certes, certes… l’épaisseur de l’intrigue, la carrure rassurante du personnage, l’haleine parfumée au tabac, et l’onctuosité de la blanquette de veau servie sur toile cirée…Humain, terriblement humain, mais, franchement, Lorgnon…… pas terriblement SEXY !
Certes, certes… mais pour rebondir sur ce sujet décisif, les fliquettes qui entourent Jack (Anthony LaPaglia, le superflic du FBI) me paraissent glaciales et même un brin castratrices. Quant aux messieurs, plus de « sex appeal » que l’homme à la pipe, pas de doute… 😉
Ecoutez, moi, je craque littéralement pour l’humain empesé sous la moustache de David Suchet incarnant Hercule Poirot.
Outre l’intérêt apporté par le jeu de l’acteur, les images en papier glacé d’une Angleterre surannée à travers les vices universels sont non seulement rafraichissantes, mais désopilantes.
Quant à Bruno Kramer, dans « l’homme à la pipe », voyons, le côté gros nounours réconfortant compense bien le sex appeal d’un Brad Pitt. Non?
« un brin castratrices » ! A la télé, alors, c’est comment une femme un brin « castratrice » ? 😉 . Quant à Maigret, sans renier FBI & CO, j’aime aussi dans ses films, les vieilles maisons bourgeoises, leurs propriétaires, collier de perles et petit twin-set en cashmere, jupe plissée ; les boulangères bavardes et malveillantes et les vieilles filles amoureuses de leur patron. Ca me rappelle ma ville natale, ses trottoirs noyés de bruine, et la bourgeoisie dans toute sa splendeur. Et finalement j’aime bien.
Je me souviens avec delectation des apres-midi ombrages passes avec Maigret lors des rediffusions estivales de la serie. La torpeur ambiante, la voix chaude de Cremer… c’etait comme une sieste amoureuse. Maintenant a Londres, je suis accro a Sherlok Holmes, avec le certes blafard mais neanmoins impeccable Jeremy Brett.