DSC03533ferli14Voilà qui ne fera pas plaisir à Monsieur Jack Lang, actuel directeur de l’Institut du monde arabe et promoteur dans les années 70 du graffiti urbain et autres tags, devenus avec les années le « Street-art » (« Strie-tarte » comme le rapporte Jean Clair).

« Une autre forme d’ex-voto est apparue. Ce sont les tags qui ont commencé de couvrir les murs à la fin des années 70. Ils sont à la haine, à la détestation, à la violence, ce que les ex-voto des églises avaient été à l’amour et à la grâce. Ce ne sont plus des amulettes pour protéger, mais des talismans, pour menacer et pour détruire.
Au départ, simples inscriptions hâtives et naïves, pour laisser le souvenir d’un passage, la marque d’un amour, d’un geste d’éclat, comme le Kilroy was here des soldats américains, après guerre, tracé sur les endroits les plus inattendus, ils sont devenus agressifs, avec des rouges et des jaunes flambants. Ils débordent jusqu’à envahir les façades, les rues, les tunnels, les trains, les métros, tous les lieux publics et désormais aussi les lieux privés, grimpant jusqu’au sommet des maisons.
Ces graffitis votifs, propitiatoires, annoncent la destruction des humains dont ils maculent les murs. On marque à la bombe, d’une croix, d’un graffïte, comme toujours dans l’Histoire, les maisons et les passages, pour désigner celles et ceux qui les habitent ou qui les empruntent, destinés à être exterminés, comme dans le Livre de Daniel l’inscription en lettres flamboyantes qui annonce la mon du roi chaldéen Balthasar. Ils sont aussi et simplement des crachats, pareils à ceux qu’enfants on se lançait au visage pour marquer sa détestation. »
Jean Clair, La part de l’ange, Journal 2012-2015, Gallimard, 2016.

Illustration: photographie ©Lelorgnonmélancolique.

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Patrick Corneau