BradWiederholt« En effet, un caractère construit sur la médiocrité ne s’embarrasse guère de réflexions sur le caractère fictif des choses et des connaissances, simples bizarreries à ses yeux. Il connaît les questions d’opérations, les problèmes d’analyse et de synthèse, mais ne s’intéresse jamais aux problèmes de l’existence. Peu préoccupé de savoir s’il s’agit là de formes de vie ou de formules d’algèbre, il s’acharne simplement à ce que ‘la solution tombe juste’. »
Hermann Broch, Les irresponsables.

ferli13Dans une existence professionnelle passée, il me semble avoir côtoyé un grand nombre de ces esprits imbibés de chiffres et fort préoccupés que « la solution tombe juste ». Celle-ci bien évidemment à mille lieues des « problèmes de l’existence » alors qu’ils se gargarisaient de l’efficience de leur pragmatisme et prétendaient « coller à la réalité ». Faut-il les appeler irresponsables?

« L’infériorité de l’esprit se mesure à la grandeur apparente des objets et des circonstances dont il a besoin pour s’émouvoir. Et surtout à l’énormité des mensonges et des fictions dont il a besoin pour ne pas voir l’humilité de ses moyens et de ses désirs. »
Paul Valéry, « Moralités », Commerce, hiver 1929.

Illustration: photographie de Brad Wiederholt.

  1. catherine says:

    Les chiffres ont mauvaise presse et c’est bien dommage. Ils sont plus près du merveilleux et du mystère que bien des discours. Le seul piège à éviter est de ne pas les laisser trop s’approcher de l’utile, de l’économique, de l’entreprise. J’ai beaucoup aimé les mathématiques quand j’étais enfant, et avoir compris la règle de trois (avec un léger effet retard) en neuvième je crois, reste un des plus beaux moments de ma vie, comme une révélation si on veut. Je pourrais même vous montrer l’endroit, rue des courtils. Il faut juste une petite robe à pois, une barrière blanche, et rentrer de l’école en sautillant.
    Depuis, les nombres ne m’ont jamais rebutée, qu’ils soient amiables (cf la jolie anecdote dans « la déesse des petites victoires »), imaginaires, ou d’or. Compter en base sept a un petit côté amusant et trompe la mort. Ils se marient bien à la rêverie, les chiffres sont drôles, ils ont leur vie propre.
    Alors la responsabilité… !
    Bien à vous,
    Catherine
    avocate des chiffres

Laisser un commentaire

Patrick Corneau