Mon voyage en Égypte, une horreur. C’est affreux là-bas, cette pauvreté, on est harcelé par les enfants, oui bon, les pyramides, mais ces enfants, les étals de viande, c’est à vomir, l’eau? non, je n’en ai pas bu… enfin, c’était pénible, mais j’ai ramené trois cent quarante photos, ça fait des souvenirs*.
Mon voyage au Brésil, une horreur. C’est affreux là-bas, ces favelas, on est harcelé par les vendeurs à la sauvette, oui bon, la samba, mais cette misère à côté du luxe, c’est choquant, les piranhas? non, je n’en ai pas vu… enfin, c’était éprouvant, mais j’ai ramené trois cent quarante photos, ça fait des souvenirs.
Mon voyage en Inde, une horreur. C’est affreux là-bas, cette pauvreté, on est harcelé par les mendiants, oui bon, le Taj Mahal, mais ces mendiants, les vaches dans les rues, c’est à fuir, l’eau? non, je n’en ai pas bu… enfin, c’était pénible, mais j’ai ramené trois cent quarante photos, ça fait des souvenirs.
Mon voyage au Kenya, une horreur. C’est affreux là-bas, cette pauvreté, on est harcelé par les enfants, oui bon, les animaux, mais ces enfants, les mouches, c’est insupportable, des cathédrales? non, je n’en ai pas vu… enfin, c’était dur, mais j’ai ramené trois cent quarante photos, ça fait des souvenirs.
Mon voyage en Grèce, une horreur. C’est affreux là-bas, cette crise, on est harcelé par les agences de tourisme, oui bon, les temples, mais cette sécheresse, cette chaleur, c’est invivable, l’ouzo? non, je n’en ai pas bu… enfin, c’était terrible, mais j’ai ramené trois cent quarante photos, ça fait des souvenirs.
Mon voyage au Maroc, une horreur. C’est affreux là-bas, cette pauvreté, on est harcelé par les enfants, oui bon, les souks, mais ces mosquées, toutes ces femmes voilées, on est gêné, le désert? non, je ne l’ai pas vu… enfin, c’était laborieux, mais j’ai ramené trois cent quarante photos, ça fait des souvenirs.
Mon voyage en Suisse, une horreur. C’est affreux là-bas, cette richesse, tout est propre en ordre, oui bon, les montagnes, mais les banques, les vitrines des joailliers, c’est à vomir, la neige? non, je n’en ai pas vu… enfin, c’était ruineux, mais j’ai ramené trois cent quarante photos, ça fait des souvenirs.
* Déclinaison/extrapolation à partir d’un texte de Mara Goyet dans Formules enrichies, Coll. Café Voltaire, Flammarion, 2010.
Illustration: photographie de Martin Parr