hmorganlettrine2.1290069074.jpgvialattearlea.1290069038.jpgUne belle définition de la littérature trouvée dans le délicieux recueil de critiques littéraires d’Alexandre Vialatte (La Montagne, Spectacle du Monde, Paris-Match) compilées récemment à l’heureuse initiative des éditions Arléa (Critique littéraire – Le talent est toujours d’acyualité, Alexandre Vialatte, Arléa, 2010).

« La science explique le monde, elle répond aux questions. Elle veut savoir. La littérature veut s’étonner. Elle est à base d’éblouis­sement. Elle ne répond pas, elle questionne. Elle prend plaisir à ne pas comprendre, comme un enfant devant le prestidigitateur. Elle est en état de fascination.
Ce qui la passionne, ce n’est pas le pourquoi, c’est le comment. Comment les choses se passent. Car on n’y comprend rien. On s’y trouve tellement habitué qu’elles paraissent toutes naturelles. Mais arrêtez-les une seconde. Ou regardez-les passer en restant immobile, et vous n’y comprenez plus rien. Un ins­tant d’attention et tout devient un mystère. Comme pour l’enfant qui découvre ses doigts en les voyant remuer dans un rayon de soleil. Et c’est la tâche de la littérature de rendre ce mystère des choses. Elle a pour rôle de faire le portrait de l’indicible. »

Et Vialatte de citer Ionesco: « L’explication nous sépare de l’étonnement, qui est la seule façon de nous rapprocher de l’incompré­hensible. Ne pas comprendre, être stupéfait, c’est ce qui est encore le plus près de la compréhension de l’incompréhensible. »
« Eugène Ionesco », La Montagne, 8 février 1970.

Et c’est ainsi qu’Alexandre Vialatte est grand.

Illustration: Couverture Editions Arléa

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Patrick Corneau