Toute erreur humaine, poétique, spirituelle, n’est rien d’autre en vérité qu’un manque d’attention. Cristina Campo*
Il est banal de reconnaître qu’aujourd’hui la vitesse n’est plus seulement la mesure du déplacement mais qu’elle est devenue la définition du présent dans un monde où elle est devenu LA norme. La vitesse en soi n’est pas l’ennemie, ni l’amie. Le culte de la vitesse, en revanche, est une plaie. Plaie qui se paie par un revers dont on commence à peine à mesurer les ravages: une perte d’attention et un manque de concentration longue. Les éducateurs et les « travailleurs intellectuels » en savent quelque chose. Dans le feuilletage des pages, le zapping généralisé, on atteint un étonnant mélange de fascination pour la vitesse et de désir du moindre effort. Caricature? Qui, parmi nous, blogueurs, choisit l’escalier plutôt que l’ascenseur? Qui ne penche spontanément vers le moindre effort?
J’ai abordé par le passé ce thème fascinant de l’attention, pas tellement dans son économie ou sa dimension psychologique, mais comme puissant instrument de connaissance et d’approfondissement spirituel. Sans aucun doute, Simone Weil est la philosophe qui en a le mieux articulé les dimensions morales, métaphysiques, avec une force qui nous retient encore. Dans un très bel article Attention et simplicité, publié ce mois-ci dans La Revue des Deux Mondes, Edith de la Héronnière revient sur cet aspect de la pensée de Simone Weil pour en montrer l’éminente actualité. Voici le début de l’article.
* Voici le portrait que Pietro Citati a fait de Cristina Campo, cette « belle aristocrate mystique »: « C’était une créature de feu, violente, extrême, pleine d’ardeur chevaleresque, une Clorinde qui ignorait la prudence et les moyens termes. Elle vivait au milieu des contraires: espoir et désespoir, passion et mépris, fureur et douceur; et elle ne trouvait une sorte de paix que dans l’intensification de ses propres contradictions. »
Illustration: peinture de Samuel John Peploe (1871-1935)