On ne saurait retirer à Henri de Montherlant la lucidité dont il faisait preuve dès 1940 (!), dans ce passage de Le Solstice de juin, et que devraient méditer les cohortes de péroreurs patentés ventriloqués par les médias :
« Ceux-là sont faibles d’esprit, qui tiennent pour faiblesse d’esprit de ne pas suivre le contemporain dans chacun de ses moments, qui se font une obligation sublime d’avoir une opinion sur tout le contemporain (opinion qui neuf fois sur dix est une billevesée), de prendre parti à propos de tout, et dont cet amoncellement de jugements et d’opinions, s’il laissait trace, formerait un fumier d’inanité et de ridicule (…). Un peintre, un sculpteur, un compositeur de musique, n’est pas tenu de dire son mot à tout bout de champ sur tout et rien: sur des « débats » qui sont artificiels, des « problèmes » qui n’en sont pas, des situations dont c’est temps perdu que d’y réfléchir, puisqu’elles seront renversées le lendemain. Mais un écrivain, oui bien. »

Que l’on peut tempérer avec Christian Bobin:
« J’aurais aimé passer ma vie à ne pas dire un mot ou bien juste les mots nécessaires à la venue de l’amour et de la clarté, très peu de mots en vérité, beaucoup moins que de feuilles sur les branches du tilleul. »

Illustration: origine inconnue.

    1. delorée says:

      Cédric, voilà assurément votre meilleur commentaire de tous les temps. Selon mes chèvres, bien entendu.

      Ps: Si vous ne l’avez déjà vu, essayez de regarder « Printemps, été, automne, hiver… et printemps » de Kim Ki-duk, conseillé par notre Moine vénéré. Fasse le ciel que monsieur Lorgnon nous écrive un jour un article sur ce film… s’il existe (le ciel 🙂 )

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Patrick Corneau