Dans son dernier livre*, Simon Leys cite un ami lui donnant des nouvelles du maoïsme mondain tel qu’il (re)fleurit à Paris: « Je ne parviens pas à me départir d’un certain effroi en constatant comment le mensonge criminel sur le maoïsme perdure en toute impunité et surtout se régénère sans cesse […]. Voyez par exemple l’engouement actuel dont bénéficie en France le philosophe ‘radical’ Alain Badiou, qui se flatte d’être un défenseur émérite de la ‘Révolution culturelle’. Badiou écrit notamment: ‘S’agissant de figures comme Robespierre, Saint-Just, Babeuf, Blanqui, Bakounine, Marx, Engels, Lénine, Trotski, Rosa Luxemburg, Staline, Mao Zedong, Chou En-lai, Tito, Enver Hoxha, Guevara et quelques autres, il est capital de ne rien céder au contexte de criminalisation et d’anecdotes ébouriffantes dans lesquelles depuis toujours la réaction tente de les enclore et de les annuler.’«
Et Simon Leys de commenter: « J’ai sans doute tort de reproduire ici une citation de ce Badiou – que je ne connais d’ailleurs pas (et je n’oublie pas le vieux proverbe chinois: ‘Ne prenez jamais la bêtise trop au sérieux’). Mais, n’empêche, je suis choqué: quelle injustice! Le nom de Pol Pot a été omis du petit panthéon badiolien – et il aurait pourtant tellement mérité d’y figurer, surtout en ce moment. »
Rectification apportée par Frédéric Pagès qui mentionne dans 4 semaines avant l’élection que « Le philosophe Alain Badiou regrette un de ses articles écrit en 1975, intitulé ‘Kampuchéa vaincra!’, dans lequel il encensait les Khmers rouges et leur régime génocidaire. ‘Je l’ai écrit parce que j’avais été enthousiasmé par (leur) victoire (…). Nous devons méditer sur les ravages causés par l’enthousiasme victorieux, prématuré et sans limites’ explique Badiou dans Le Point« . Et Pagès de s’exclamer: « Un peu court et peu enthousiasmant! »
C’est le moins qu’on puisse dire de la part de cette bien-pensance donneuse de leçons toute imbue de son École Normale Supérieure…
*Le studio de l’inutilité/ »Le génocide cambodgien », texte issu d’un compte-rendu paru dans Commentaire (automne 2oo9) du livre de Francis Deron: Le Procès des Khmers rouges. Trente ans d’enquête sur le génocide cambodgien. Gallimard. 2oo9.
Illustration: Alain Finkielkraut avec Alain Badiou, photographie Le Nouvel Observateur/Dessin de Micaël
« Je suis profondément désolé pour les meurtres, pour le passé. Je ne voulais être qu’un bon communiste. » (Duch, cité lors de son procès)
En effet.