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hmorganlettrine2.1258988005.jpgIl est d’usage de pester contre la grande ville (solitude, anonymat, insécurité, pollution, etc.). Et pourtant sait-on ce qu’on lui doit en termes d’urbanité, cette qualité de l’homme de la ville éminemment civilisatrice: confronté à la diversité des êtres, des conditions, des opinions, l’individu se polit. Mais il y gagne surtout la liberté d’y vivre comme il l’entend (pour vivre heureux, vivons cachés). Ce qu’avait bien compris Descartes conseillant à son ami Guez de Balzac, dans une lettre du 5 mai 1631, de choisir de résider à Amsterdam, comme lui:
« Quelque accomplie que puisse être une maison des champs, il y manque toujours une infinité de commodités, qui ne se trouvent que dans les villes […]. En cette grande ville où je suis, n’y ayant aucun homme, excepté moi, qui n’exerce la marchandise, chacun y est tellement attentif à son profit, que j’y pourrais demeurer toute ma vie sans être jamais vu de personne. Je me vais promener tous les jours parmi la confusion d’un grand peuple, avec autant de liberté et de repos que vous sauriez faire dans vos allées, et je ne considère pas autrement les hommes que j’y vois, que je ferais les arbres qui se rencontrent en vos forêts, ou les animaux qui y paissent. Le bruit même de leur tracas n’interrompt pas plus mes rêveries, que ferait celui de quelque ruisseau. »

Illustration: dessin de Sempé.

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Patrick Corneau