Officiellement Renatus Descartes est mort d’une pneumonie. La reine de Suède, qui l’avait attiré à sa cour, l’obligeait à lui donner des leçons à cinq heures du matin dans une pièce glaciale. Le pauvre homme ne l’aurait pas supporté. Des rumeurs d’empoisonnement coururent, qui finirent assez vite par s’éteindre. Dans Der rätselhafte Tod des René Descartes (« La mort mystérieuse de René Descartes »), l’universitaire allemand Theodor Ebert a décidé de les prendre au sérieux et s’en explique dans un entretien donné au magazine Books.
Ebert, qui n’est pas Botul, a écumé les archives de Stockholm et de Paris, à la recherche des récits de témoins oculaires des derniers jours du philosophe. Sa conclusion l’agonie de Descartes présente tous les symptômes d’un empoisonnement à l’arsenic: vertiges, maux d’estomac, puis fièvre accompagnée de sécrétions nasales abondantes. Ebert donne même le nom du meurtrier présumé: François Viogué, un jésuite, qui aurait commis son forfait au moyen d’une hostie empoisonnée. Viogué connaissait les tendances catholisantes de la reine Christine. Il en avait informé ses supérieurs à Rome. Selon Ebert, il est très probable qu’il a vu en Descartes un obstacle à la conversion de la reine à la foi catholique…L’Alma Mater française balaye d’un revers de main ce qu’elle juge invraisemblable: pour l’académicien Jean-Luc Marion, « la question, purement anecdotique, n’a aucun intérêt » (voir les réactions des universitaires dans Le Figaro).
Qui sait, un scénario en or pour un « thriller philosophique » à Hollywood (avec Harvey Keitel dans le rôle-titre, Scarlett Johansson en reine Christine, John Malkovich en jésuite fourbe…)? Peu importe le flacon pourvu qu’on ait la ressemblance, à défaut de vérité. Ce qui me rappelle le mot de Valéry que Paulhan admirait le plus. A quelqu’un qui, s’extasiant au Musée de Haarlem devant le portrait de Descartes, s’écriait: « Comme il est ressemblant! », « A qui? » demanda simplement le poète.
Illustrations: La maison familiale de René Descartes à Châtellerault ©Lelorgnonmélancolique / René Descartes et la Reine Christine de Suède d’après Pierre Louis Dumesnil (1698-1781).
Ca ma vraiment plu cet article, Bonne continuation.
Cher Lorgnon Mélancolique,
Sur la toile de Dusmenil, la reine Christine ne serait pas plutôt la brunette au long nez? MM
La légende du tableau est très certainement erronée. Il s’agit plus probablement d’une copie réalisée par Nils Forsberg d’après Dumesnil. Pour le reste, difficile de contester JL Marion. C’est effectivement anecdotique. Descartes n’en reste pas moins un auteur qu’il faut considérer « comme pas très catholique »…