Cette leçon d’économie domestique devant le bac à sable (accompagnée d’un cruel lynchage entre copines) n’est pas la moindre des scènes édifiantes de ce splendide (Kate Winslet est parfaite) et terrible film sur la respectable Amérique des banlieues pavillonnaires. Y sont traités avec une noirceur peu hollywoodienne de nombreux sujets « sociétaux » comme la vie de couple en province, le statut du mâle blanc en période post-féministe et le devenir de sa libido, la pédophilie comme exutoire aux frustrations collectives, le conformisme social, l’ennui, l’ostracisme (la scène de la piscine est anthologique), etc. Tous sujets, bien sûr, que la « vieille Europe » partage désormais avec la toujours jeune Amérique. John Cheever avait dépeint les symptômes précurseurs de l’effondrement, ce film ramasse quelques morceaux et nous les montre…

Little Children, film de Todd Field (USA, 2006). Scénario : T. Field, Tom Perrotta, d’après son roman.

  1. Caroline says:

    Hélas ! je n’ai jamais été une mère parfaite… Oubli de me lever pour les amener à l’école, oubli de m’arrêter devant l’école pour les déposer, pas de jardins publics où papoter avec les autres mamans des couches-culottes et de la meilleure école maternelle de la ville pour en faire des polytechniciens ou des énarques (ou les deux, même !), les faire dormir dans un coin de bodega au milieu des flonflons… Et des goûters, quand j’y pensais, surtout sans Nutella, mais avec un jambon beurre plus fréquemment. Aujourd’hui, l’aîné a 26 ans, la dernière 19 ans, ils n’ont pas l’air traumatisés, n’ont pas l’air d’avoir souffert d’avoir eu des emplois du temps qui n’étaient pas pleins comme un oeuf d’activités sportives, artistiques, intellectuelles et j’en passe et des meilleures. Une seule chose, il n’ont jamais eu de consoles de jeux (ils avaient la campagne pour ça, pour les consoler de jouer) et ne sont jamais allés à Euro Disney. Pour ces mauvais traitements, je n’ai toujours pas eu de procès de leur part !

    Félicitations. Peut-on qualifier ce type d’éducation de « cousue main »?  😉

  2. DESORMIERE says:

    J’ai beaucoup aimé ce film. Si juste dans la peinture de l’insupportable obligation d’être « comme tout le monde », qui fait que, dans cet univers, l’on devient une mégère cancanière, obsédée et frustrée si l’on s’y plie et une marginale vite démasquée si l’on s’y refuse. Oui, très beau film avec cette réserve : la fin, granguignolesque et bien pensante. Tous les déviants, des pires aux plus inoffensifs sont punis. Hollywood est passé par là. On ne rigole pas avec la morale.

    Oui, je partage votre avis et votre déception concernant la fin, ce « happy end » où, après la crise et un sérieux ébranlement des valeurs, tout rentre dans le rang, la vie (la même?) continue…

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Patrick Corneau