O BALSAMO DO DESILUSAO. LE BAUME DE LA DÉSILLUSION.
La désillusion passe pour un mal. Préjugé irréfléchi. Par quel moyen, sinon grâce à la désillusion, découvririons-nous ce que nous avons attendu et espéré? Et en quoi, sinon dans cette découverte, résiderait la connaissance de soi?
Nous ne devrions pas subir les désillusions en soupirant, comme si notre vie pouvait être meilleure sans elles. Nous devrions les rechercher, les suivre à la trace, les collectionner. Pourquoi suis-je déçu si les comédiens adorés de ma jeunesse portent maintenant tous les signes de la vieillesse et du déclin? Que m’enseigne-t-elle, la déception, sur le peu de valeur du succès?
(…) Celui qui voudrait vraiment savoir qui il est, devrait être un infatigable et fanatique collectionneur de désillusions, et la recherche d’expériences décevantes devrait être pour lui une obsession, l’obsession déterminante de sa vie, car il verrait alors en pleine lumière qu’elle n’est pas un poison brûlant et destructeur, la désillusion, mais un baume frais, apaisant, qui nous ouvre les yeux sur les vrais contours de nous-mêmes.
Et il ne devrait pas seulement s’intéresser aux déceptions qui concernent les autres ou les circonstances. Quand on a découvert que la déception est un fil conducteur qui mène jusqu’à soi-même, on sera curieux d’expérimenter à quel point on peut se décevoir: à cause du courage qui manque et de la sincérité qui fait défaut, par exemple, ou des limites terriblement étroites imposées à ce que l’on sent, fait et dit. Qu’était-ce donc, ce que nous avions attendu et espéré de nous? D’être sans limites ou tout autres que nous sommes?
On pourrait avoir l’espoir de devenir plus réel en diminuant ses attentes, en se rétrécissant jusqu’à n’être plus qu’un dur noyau fiable et ainsi immunisé contre la douleur et la déception. Mais que serait une vie qui s’interdirait toute attente de grande portée, immodeste, une vie où il n’y aurait plus que des expériences banales comme l’arrivée de l’autobus?
Extrait de Train de nuit pour Lisbonne de Pascal Mercier, traduit de l’allemand (Suisse) par Nicole Casanova, Marren Sell Editeurs, 2006, pp. 260-261.
Cette extrait est là aussi pour nous rappeler la puissance désillusionnante de la littérature: « Comme Mme de Rénal n’avait jamais lu de romans, toutes les nuances de son bonheur étaient neuves pour elle. » Stendhal
Illustration: Michael Johnson/Flickr.
Du baume de première qualité.
Y’a pas de mystère. Ce magasin propose la crème des produits, et jamais l’arrivée de l’autobus. 🙂
Kiki
» O Bálsamo da Desilusão »
Il n’ya pas meilleur rémede pour effacer la « desilusão »que le « temps »!
Ou peut-être la désillusion nous invite à un recommence plus rapid!
Le grand risque de la désillusion, c’est la démobilisation générale des déçus. Le spectacle, hier soir, de la « modernité culturelle du président élu fut pitoyable…
http://bboeton.wordpress.com/2007/05/07/un-film-du-dimanche-soir-a-pleurer/
Lue, relue, re-relue cette très belle réflexion tout au long de la journée, chaque fois que la colère reprenait aveuglément le dessus.(Aïe! « Colère aveugle = cliché littéraire », me dirait ma fille!).
Kiki a raison : cette maison ne livre que de l’onguent de premier choix …
Donc attendre encore l’autobus…je veux dire,
ce tramway nommé désir…