Sigmund Freud disait que le recueillement autour d’un livre était la seule contribution positive qu’aient trouvée les hommes au processus redoutable de la civilisation. Mais, comme chacun sait, les civilisations et leurs cultures sont mortelles et il y a vingt ans, Ivan Illich pouvait déjà affirmer qu’on était parvenu à la conclusion de l’ère du livre: « Le livre n’est plus aujourd’hui la métaphore clef de l’époque: l’écran a pris sa place. Le texte alpha­bétique n’est plus que l’une des nombreuses manières d’encoder quelque chose que l’on appelle désormais le « message ». (…) Nous assistons à la dissolution de la technique alphabétique dans les miasmes de la communication ».
De fait, comme ce reportage le montre, nous sommes entrés en décivilisation.

Illustration: reportage France2, « Journal de 20 heures » du 24/08/2012.

  1. Je ne pense pas que l’on puisse, à partir d’un petit reportage caricatural, tirer une théorie sur l’arrivée de la « décivilisation ».

    On n’a jamais autant lu de livres (voir la dernière « rentrée » littéraire), et que ce soit sur papier ou sur écrans, quelle est la différence ?

    Les apôtres du déclin de la civilisation (blanche, forcément), tels les Finkielkraut et « penseurs » du même tonneau, devraient alors dare-dare cesser de publier leurs anathèmes et leurs regrets éternels.

    1. Cher Dominique, avec toute l’estime que j’ai pour vous, vous vous leurrez complètement. Je peux témoigner à partir de mes dernières années d’enseignement que ce reportage est même en dessous de la réalité (catastrophe absolue que personne à l’Educnat ne veut voir, ou plutôt, on voit mais comme le « mammouth » est irréformable, on crée des commissions…). Quand à la « rentrée littéraire » c’est une vaste fumisterie orchestrée par les médias et la com’ des éditeurs, allez interroger les libraires vous verrez leur désarroi. Je passe sur le cas « Finky » car c’est votre fixette favorite… Bien amicalement.
      😉

  2. Axel says:

    Cher Lorgnon,

    Si l’on m’avait filmé à 16 ans j’aurai sans l’ombre d’un doute ressemblé à ces adolescents ; un clavier à la place de la guitare de l’un, et aussi fasciné que l’autre par l’écran… A l’époque, hors lectures obligatoires, je devais lire 2 ou 3 livre l’an (mes copains lisaient sans doute moins encore…). La lecture et les livres n’occupaient alors qu’une place toute à fait marginal dans mon univers familial.

    Aujourd’hui je croule pour mon plus grand plaisir sous les livres et je suis tout à fait déconnecté du consumérisme cathodique (terme désormais impropre à l’ère des écrans plasmas).
    Je n’en tire pour autant aucune règle.

    Les adolescents d’aujourd’hui lisent-ils plus ou moins que les générations précédentes ? Lisent-ils autrement ? Lisent-ils d’autres choses ? Etc. C’est un vaste sujet que l’on n’est pas prêt, il me semble, d’épuiser…

    Pour illustrer mes doutes, tout d’abord une petite étude trouvée sur la toile précisément sur ce sujet. En la parcourant en diagonale mon sentiment serait que les choses ne sont pas aussi dramatiques qu’on voudrait bien le prétendre :

    http://dansloeildulecteur.free.fr/documents/lecture_ado.pdf

    Un autre lien m’interpelle plutôt. Cela concerne l’évolution des choix de lectures :
    En 1993, chez les ados de 17ans, le palmarès était : « Candide en tête, puis L’étranger, Germinal, Le Rouge et le Noir, La peste, Madame Bovary, Les fleurs du mal… »
    En 2006 : « Harry Potter, la « littérature classique », citée comme telle, Eragon, Gossip girl, Le parfum, L’étranger, Ensemble, c’est tout, Hésitation, Les chevaliers d’Émeraude, Mary Higgins Clark (citée également comme telle)… ».

    http://bbf.enssib.fr/consulter/bbf-2011-05-0032-005

    Quelles conclusions en tirer. Je ne sais trop.
    Rien de définitif à mon sens.

    Très bonne journée à vous, sous un soleil en demi-teinte

    Ps : j’en profite pour ajouter que dans le milieu professionnel ou j’évolue (et qui est un fort intéressant laboratoire), se trouvent fort peu de lecteurs de livres (la moyenne est de l’ordre de 2 à 5 livres l’an). Toutes les personnes dont je parle ont plus de 40 ans, et leurs lectures se limitent à quelques lignes sur les journaux gratuits du matin, quelques sites d’informations sur la toile. Les ‘vrais’ livres, c’est seulement durant les vacances, et pour la plupart plutôt des livres d’actualité).

  3. miette says:

    Lire ? mais pourquoi faire ?
    et puis, c’est considéré comme un travail par ces jeunes, pas comme un loisir… et il y a tellement d’autres distractions… alors à quoi bon…
    en fait, l’accès à la culture est toujours aussi élitiste. rien n’a changé, sauf qu’on aurait pu espérer mieux.
    Le plus grave, c’est ce qu’on a fait de la télévision : ce merveilleux outils de connaissance accessible à tous… voyez ce que ça aurait pu être (clic)
    regardez quelle machine à décérébrer c’est devenu… 🙁

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Patrick Corneau