Au cours de sa défense peu véhémente mais, somme toute, digne, Frédéric Mitterrand hier soir a posé à la Ferrari (plus peste que jamais) la question-clé, le retour de flamme qui tue: « Avez-vous lu mon livre? », réponse ingénue de la Laurence: « Non, je n’ai lu que les passages concernés. » Alors j’ai tout de suite repensé au passage du dernier roman de Philip Roth où Zuckerman cite la lettre qu’Amy Bellette – ulcérée par l’incurie des « chroniqueurs culturels » – a envoyée au courrier des lecteurs du Times:
« Si j’avais le pouvoir d’un Staline, je ne le gaspillerais pas à réduire au silence les romanciers. Je réduirais au silence ceux qui écrivent sur les romanciers. J’interdirais toute discussion publique de la littérature dans les journaux, les magazines et les revues spécialisées. J’interdirais l’enseignement de la littérature dans tous les établissements scolaires, du primaire au supérieur en passant par le secondaire. Je prohiberais les groupes de lecture et les chats de discussion sur les livres sur Internet, et je mettrais sous surveillance les librairies pour vérifier qu’aucun vendeur ne parle de livres avec un client, et que les clients n’osent pas se parler entre eux. Je laisserais les lecteurs seuls avec les livres, pour qu’ils puissent en faire ce qu’ils veulent en toute liberté. Je ferais cela pendant autant de siècles qu’il en faudrait pour désintoxiquer la société du poison de votre charabia. »
Philip Roth, Exit le fantôme, Gallimard, 2009.
Illustration: document TF1/YouTube
Me permets de vous proposer sur mon bloc-notes:
http://lamauragne.blog.lemonde.fr/2009/10/09/ils-memmerdent-toutes-et-tous-avec-leur-vrai-fausse-polemique-sur-frederic-mitterrand/
Bien cordialement,
jf.
Votre blog est toujours remarquable de finesse, de justesse, d’esthétisme … Cela fait des mois que je le lis quotidiennement, comme un chat qui boit du lait, sans cesse épatée par ce que vous écrivez. Merci ! Merci ! Merci !
Eh bé….
Vous allez me faire rougir de confusion.
jf.
Vraiment parfait, ce texte de Ph. Roth ! On ne peut qu’y adhérer, en constatant, comme vous l’écrivez si bien « l’’incurie des “chroniqueurs culturels”…
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Ferrrari : le fantôme de l’opinion publique.