L’affaire EADS pourrait être interprétée comme une sorte de commentaire ironique de l’idée de société du risque. Les milliers de salariés qui ont perdu ou vont perdre leur travail (à la suite du drastique plan de restructuration « Power 8 ») et leurs avoirs couraient assurément un risque, mais sans réelle possibilité de le mesurer, car on n’a pas manqué de leur présenter le risque en question comme une fatalité aveugle (la fameuse main invisible du marché). Ceux qui en revanche disposaient d’informations internes sur les risques réels encourus (retards techniques, baisse du dollar, etc.) et donc de réelles possibilités d’intervenir et de modifier la situation (les décideurs et les responsables managériaux) ont pu minimiser leurs risques en vendant leurs stock options avant la récession: les risques réels et les possibilités de choix étaient ainsi bien distribués… On peut dès lors soutenir, à propos de l’idée répandue selon laquelle la société contemporaine est une société du choix risqué, que certains (les dirigeants et les managers d’EADS) font les choix tandis que les autres (les salariés ordinaires) prennent les risques… Logique du partage qui n’est pas sans nous rappeler la blague cruelle d’Ernst Lubitsch dans To be or not to be lorsque le colonel Erhardt, chef de la Gestapo, doit s’expliquer sur les camps de concentration en Pologne occupée, celui-ci coupe vivement court à la discussion: « Nous nous occupons de la concentration, les Polonais des camps ».
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To risk or not to risk
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Patrick Corneau
To be abused or not to be abused, that is the question…
Touché… Exactly so! 🙂