Combien de siècles faudra-t-il à notre narcissisme constitutif pour digérer les volées de vexations que la science ne cesse d’apporter à notre « nostrocentisme* »?
La dernière n’est pas moindre puisqu’elle concerne la réévaluation de la place qu’occupe l’homme dans le cosmos. Elle n’est pas nouvelle car Epicure, Fontenelle ou Giordano Bruno l’avait esquissée en leurs temps: la présence d’une vie extraterrestre. La découverte en 1995 des exoplanètes** dans le nuage de 150 milliards de soleils qui compose notre galaxie (et sans doute bien au-delà), confirmée récemment par une équipe d’astronomes européens, pose à l’humanité des questions qui relevaient jusqu’à maintenant de la science-fiction: comment réagirons-nous si demain nos machines détectent une intelligence extraterrestre et quel en sera l’impact sur l’ensemble de nos représentations anthropologiques, morales et religieuses? Si avec la vexation copernicienne la Terre n’apparaissait plus comme une scène de grâce sur laquelle Dieu s’est révélé aux hommes, mais modestement comme un lieu excentrique dans un système astrophysique, la vexation issue de la révélation d’intelligences extra-terrestres fait disparaître l’homme – et l’alliance qu’un Dieu de bonté aurait nouée avec lui – dans les gouffres d’interrogations insondables. Bien sûr, aucun des actuels promoteurs de cette bombe à retardement cosmo-métaphysique n’esquisse l’ombre d’une réponse, puisque cette question n’effleure pas leur esprit…

*Néologisme créé par Hans Blumenberg: penchant coupable de notre époque pour imaginer que notre propre présent est le centre de l’histoire du monde. On échappe à un anthropocentrisme que pour le voir compenser par un autre centrisme…
**La première exoplanète de notre galaxie a été repérée en 1995 par deux astronomes genevois à l’observatoire de Haute Provence. Soixante de ces nouveaux mondes ont été recensés depuis et l’on estime leur nombre entre 5 à 50 milliards.

Illustration: « Creating a false star », photographie par Donald Hoekwater

 

  1. totem says:

    En symbiose totale avec votre analyse, mais Benoit XVI veille sur sa concurrence aujourd’hui en amérique du Sud et les intégristes de tous bords ont encore de beaux jours devant eux.

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Patrick Corneau