O beata solitudo, O sola beatitudo. Saint Bernard (devise de la Trappe)

hmorganlettrine2.1246171888.jpgIl existe d’étranges affinités entre ces contemporains inactuels que sont Ludwig Wittgenstein, Thelonius Monk et Glen Gould. Outre que le biographe du premier a le nom prédestiné de Monk, de subtils rapports relient les mondes de ces trois assoiffés de solitude. Des solitudes reliées entre elles. Trois tombes et trois mystères. Et un point commun: pour cultiver leur art, il leur faut un brouillard aléatoire fait de distance, de solitude et de silence et non un public.

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Pour Wittgenstein le questionnement philosophique était proprement une maladie de l’esprit qui appelait une thérapie adéquate: « débrouiller les confusions grammaticales » qui nous induisent à philosopher. Le prix à payer étant la démolition d’un certain nombre de « châteaux de cartes » dont la métaphysique et la religion – rien de moins. Cet autodidacte provoqua une colère mémorable de Gilles Deleuze qui l’accusa de vouloir assassiner la philosophie. A Russell qui le dissuadait de vivre seul pendant deux ans dans une hutte en Norvège, il rétorqua qu’il prostituait son esprit en parlant avec les gens intelligents de Cambridge. « Je lui ai dit qu’il ferait sombre, raconte Russell, et il m’a répliqué qu’il détestait la lumière. Je lui ai dit alors qu’il était fou, et il m’a dit: ‘Dieu me garde de la santé mentale!’ » Il n’a jamais porté de cravate. Pendant six ans il fut maître d’école dans des villages pauvres des montagnes autrichiennes. Vivant dans l’austérité la plus évangélique, il essaya vainement « de sortir du fumier » les plus doués de ses élèves. Un certain été de l’après guerre, il s’était engagé comme assistant jardinier dans un monastère…

Illustration: la « cabane » de L. Wittgenstein en Norvège, photographie anonyme.

  1. Rapprochement musical et bienvenu entre ces trois-là : la musique des mots s’allie avec celle des notes, souvent « pensées » par Thelonius Monk ou Glenn Gould.

    Chacun d’eux avait sans doute une « hutte » dans la tête : il nous manque donc ici deux photos.

    A venir… 😉

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Patrick Corneau