saintpoldeleon.1220214489.jpgHier, je mélancoliais sur la lumière qui change, sans me douter que, selon Roland Barthes, voir la lumière relève d’une sensibilité de classe. Les goûts n’existent pas ou presque pas; il n’y a que des états culturels, des positions, des partis pris idéologiques…
« Ce matin, la boulangère me dit: il fait encore beau! Mais chaud, trop longtemps! (Les gens d’ici trouvent toujours qu’il fait trop beau, trop chaud). J’ajoute : Et la lumière est si belle! Mais la boulangère ne répond pas et une fois de plus j’observe ce court-circuit du langage, dont les conversations les plus futiles sont l’occasion sûre; je comprends que voir la lumière relève d’une sensibilité de classe; ou plutôt puisqu’il y a des lumières pittoresques qui sont certainement goûtées par la boulangère, ce qui est socialement marqué, c’est la vue « vague », la vue sans contours, sans objet, sans figuration, la vue d’une transparence, la vue d’une non vue (cette valeur infigurative qu’il y a dans la bonne peinture et ce qu’il n’y a pas dans la mauvaise). En somme, rien de plus culturel que l’atmosphère, rien de plus idéologique que le temps qu’il fait. » Roland Barthes par lui-même, Roland Barthes, Le Seuil, 1976.
Et le bonheur dans tout ça? La nostalgie (qui est la conscience de l’épaisseur du temps)? Relèvent-t-ils d’une sensibilité de classe sociale, de classe d’âge, de niveau d’éducation, de degré de sophistication? Aurais-je récité (en toute sincérité) une « variable » d’une – de ma – fiche programmatique?

Illustration: photographie ©Lelorgnonmélancolique

  1. Alban says:

    aaah Roland Barthes…
    une des intelligences sociologiques les plus ignorées de ces dernières années, il me semble! et pourtant…
    Quelle sensibilité, quelle intelligence dans l’analyse! la limpidité du raisonnement. A re-découvrir d’urgence!

    Alban

Laisser un commentaire

Patrick Corneau