Pandamania, neymarmania (je passe sur la starmania de toutes les Nabilla, Beyoncé, Rihanna qui « affolent la toile »): toute une société cherche son salut dans le pathos, l’excitation du « fun » et les engouements les plus insignifiants (Paris transformé en « Disneymarland »!). Signes que le passé, l’histoire, la culture ont perdu presque tout attrait aujourd’hui où l’on attend qu’ils se détruisent à grande échelle pour laisser place aux productions éphémères d’une créativité de masse dépourvue de mémoire. Le pathos sous sa forme la plus kitsch et délétère fait recette éditoriale et médiatique dans un public qui, bourré d’informations, de publicité et de tranquillisants inutiles, plonge avec délice dans la consommation* pour se délivrer de sa propre inanité et en rapporter un semblant de sens.
Ce cauchemar vaseux – où tout est maquillé par et pour l’argent – s’appelle ‘la vie’. Pour le supporter, il n’y a pas de cellules psychologiques.
« Vivre, c’est défendre une forme » disait Hölderlin en 1802. 
Question: dans la désagrégation générale, quelle forme pouvons-nous défendre aujourd’hui?
– Personne ne lève la tête de son smartphone…

* Certains de ceux qui, il y a un mois, pleurnichaient les 5€ déduis de leur APL se jetaient la semaine dernière sur le maillot Neymar Jr PSG à 140€ pièce.

Illustration: photographie AFP.

  1. Pascale BM says:

    …sans parler de la faute de goût (de se vêtir avec de tels maillots). L’homme est un animal grégaire ET solitaire. Forcément le premier l’emporte sur le second. L’implacable loi du nombre. Les Grecs -je veux dire les anciens, les lointains- se méfiaient, à juste titre de la ‘mania’, de l’hybris. De nos jours, elle est devenue, non plus le fait d’un individu qui, comme tel, se démarquerait de la cité, symbole de raison, mais la norme. Ce qui est quand même un comble! Le sport, dont il ne fait pas bon dire du mal, concentre à mes yeux le pire de ce que les hommes en temps de paix ont pu formaliser comme symboles guerriers : les totems, les cris d’attaque, la haine du camp adverse, les tatouages, le nationalisme outrancier (y compris à l’échelle du village…) les hurlements, l’uniforme (et voilà!), l’argent, la ruse, le transfert de ‘prisonnier’, les hymnes, l’organisation au plus haut sommet de l’état. J’en passe. Je suis, depuis toujours à l’état zéro de toute bienveillance, et franchement, je m’en fous. On a tout essayé pour me convaincre des « bienfaits » à titre individuel et collectif, rien n’y fait…. plus on essaie, plus je résiste. Le maillot visé n’est qu’un minuscule concentré (!) des choses. Même si, je reconnais, cher Lorgnon, qu’entre les 5 € prélevés sur les APL et le prix de ce « machin », franchement, il n’y a aucun rapport… et que j’irais même jusqu’à dire -et non absoudre- que dans l’illusion généralisée, il manquera peut-être 5€ à celui qui croit -qui croit!- qu’il sera plus heureux avec que sans le maillot…

  2. Que dire? Bien sûr, je valide tout! Concernant le sport, l’exorbitante place qu’il occupe dans nos sociétés participe du culte du corps (organisme et apparence) qui, comme centre d’intérêt ET dévotion a supplanté tous les autres (je n’ose prononcer le gros mot d' »âme »…).

  3. Serge says:

    J’aime bien aller occasionnellement dans un stade. C’est le seul endroit où je peux voir des smicards ou des chômeurs encourager des milliardaires.

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Patrick Corneau