toux« Si vous voulez, Madame dont la toux est légère ou très-forte, ne pas troubler par ces accès la fête qui se donne dans trois jours, ou n’inquiéter pas à la maison votre entourage familier, prenez: Mousse de Corse (lichen gélatineux), Lichen d’Islande, Racines et Fleurs de guimauve, Lierre terrestre, Capillaire, Coquelicots (au total, chez l’herboriste, la valeur de dix sols); jetez dans une bouilloire et versez beaucoup d’eau; faites bouillir et réduire, ajoutez un bon quart de sucre, et faites encore réduire; le temps que cela passe d’un état gélatineux à un état syrupeux. Vous retirez et versez, refroidi, ce sirop (couleur de mûre et au bon goût de plantes pectorales) dans le pot de votre cabaret de Saxe ou dans une fiole de Venise ou de Bohême: ici cesse mon ingérence. Prendre une cuillerée à bouche de temps à autre, soit d’heure en heure. Remède compliqué? Non, simple: tandis que le rhume simple est souvent, lui, compliqué. »
Stéphane Mallarmé, La Dernière Mode. Gazette du monde et de la famille, 1874, in Le Carnet d’or, éditions des cendres, 2007.

hmorganlettrine2Mallarmé est le créateur de la revue La dernière mode, gazette du monde et de lamallarme-derniere-mode-1 famille, il en était aussi l’auteur unique. En effet toutes les chroniqueuses, grandes faiseuses de l’autorité que sont « Marguerite de Ponty », « Olympe la négresse », « Miss Satin » ou « Zizy » sont les divers pseudonymes féminins dont il s’empara pour rédiger sa revue. Seul le directeur de publication fut un personnage masculin nommé « Marasquin ». Mallarmé rédigeait tout jusque dans les moindres détails, y compris la mise page, les choix typographiques, préfigurant ainsi son travail sur le poème Jamais un coup de dés jamais n’abolira le hasard (1897). Balzac aussi s’intéressa à la mode (Traité de la vie élégante), il devait donner des conseils sur les cosmétiques et avait déjà rédigé un Code de la toilette. C’est un peu comme si aujourd’hui Yves Bonnefoy causait chiffon dans Elle.

Illustration: Affiche de Jules Chéret.

  1. Cher Monsieur Lorgnon,
    je me suis permis de vous voler un bout de texte (pourquoi réécrire ce qui est bien écrit?) à la suite d’une vignette sur une recette de Mallarmé (la confiture de noix de coco) et sur l’art de lire ce poète dans les bus cariocas.
    Par ailleurs, félicitation pour votre blog que je viens de découvrir.
    Très cordialement,

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Patrick Corneau