Je ne suis pas seul à déplorer la prédation photographique… Lu cette observation de Patrick Mauriès dans ses Fragments d’une forêt (Grasset, avril 2013):

[Clics]

Vous vous asseyez à la terrasse d’un café, place Saint-Marc; et vous vous retrouvez aussitôt, inconscient, stupide, dans une centaine de clichés pris à la même seconde par autant de couples, familles ou groupes divers, du Bavarois au Coréen, radieux d’avoir appuyé sur le déclic consacré et consonant. S’il n’y avait pas les pigeons et, parfois, les orchestres à flonflons, Saint-Marc cliquèterait.

Illustration: photographie ©Lelorgnonmélancolique.

  1. delorée says:

    Le vrai photographe se fait discret, et quand il désire vous prendre en photo, il vous le demande poliment. Le vrai photographe est en voie de disparition, il ne faut pas croire qu’il se fait plus discret encore.

    Belle journée à vous, monsieur Lorgnon.

    🙂 (avec un nez, on ne sais jamais, ce n’est peut-être pas comme avec une oreille)

  2. delorée says:

    Ca a raté encore. Le point-virgule ne se transmet point. Il m’en veut, j’en suis maintenant certain. Et ça tombe bien car je rêvais d’être certain de quelque chose. Grâce à lui, je suis comblé.

      1. delorée says:

        C’est mon deuxième sur ce blog, Cédric, et le deuxième de ma vie d’andouille sur blog. Chez monsieur Lorgnon, nous osons tout. Je me souviens encore de la belle époque de la disparition de notre hôte, pendant laquelle mon Suzerain et moi avons dû ramer pendant des jours, puis remettre un à un les rivets avalés pour ramener des eaux le croiseur désagrégé de notre mélancolique ami. Nous fûmes épuisés mais nous gagnâmes, car nous avions foi en la girafe jetée à la mer.

  3. Pierre says:

    Heureusement, il n’y a pas que la place Saint-Marc à Venise; s’y asseoir pour boire un coup relève du masochisme…
    Pierre

  4. Axel says:

    C’est drôle, car je m’efforce toujours d’éviter toute présence humaine sur mes clichés, en particulier de ruines…
    Mais cela devient un art difficile – sinon impossible.
    Heureusement il y a Photoshop pour restituer les décombres à leur solitude (je ne prends jamais autant plaisir qu’à gommer un short bariolé ou une tête obèse qui pollue le coin d’une image).

      1. Axel says:

        C’est un problème cornélien que vous posez au fond…
        Voyager ou ne pas voyager ? Nous sommes tous, à moment donné, le touriste d’un autre, le gêneur, le gâcheur de ruines ou de paysages, ou tout ce que l’on voudra du même acabit.
        Evidement on ne se pense pas d’ordinaire de la sorte. Mieux, on se sent plus légitime que ces bovins imbéciles déversés à flots par les bus climatisés de tours operators, à se trouver à tel endroit à tel moment.
        On peut regretter ces temps de jadis, ces époques où de magnifiques gravures ou lithographie représentaient les temples d’Egypte à-demi ensevelis dans les sables. Loin du fracas des foules… L’esthète et le dilettante pouvaient alors jouir en solitaire, ou selon le principe de l’affinité élective, de mille merveilles. J’avoue en rêver parfois. Mais je sais aussi que c’était là une sorte de vagabondage féodal, le loisir d’un tout petit nombre, trainant d’ailleurs souvent dans leur sillage une caravane de demi-esclaves.
        Tout le problème vient au fond de la démocratisation du voyage et de la démographie du monde comme il va. Sur le premier point, chacun pourra dans le principe s’en féliciter tout en regrettant ses effets dévastateurs (de ce point de vue les vols low-cost sont une hérésie). Quant à la démographie, on peut rêver d’un monde dépeuplé – c’est mon cas – mais qui met-on alors dans le camp de l’humanité surnuméraire ?

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Patrick Corneau