hmorganlettrine2.1264939215.jpgUne amie m’a récemment adressé un texte de René Perez (Et mon oeil!) paru en décembre dernier dans le « Télégramme de Brest »:

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Je n’ai pu m’empêcher de réagir et répondre par la paraphrase suivante:

De récentes études le confirment: les femmes ont un champ visuel plus large que celui des hommes. Elles voient tout… mais mal! Cette particularité remonte, paraît-il, aux temps préhistoriques où durant des millénaires, les femmes ont dû tout surveiller dans l’obscurité de la grotte (le feu, les marmots, les prédateurs) pendant que l’homme allait, loin du foyer, dans le vaste monde chasser le mammouth. Ce qui explique, au passage, la raison pour laquelle l’homme réussit toujours à comprendre son environnement alors que la femme est un peu décontenancée dès qu’on lui met un journal entre les mains. C’est connu. Ce particularisme visuel peut aussi éclairer une question de société revenue soudain au-devant de l’actualité: le ménage à la maison! L’homme, en raison de l’acuité de son champ visuel, bénéficie d’un avantage manifeste. Surtout le Breton qui, depuis l’Antiquité, a dû mettre la main en visière pour regarder au loin l’état de la mer, le vol des oiseaux et le profil des nuages pour son labeur quotidien. Il en a développé une aptitude à poétiser le monde qui, par ricochet, a stimulé son imaginaire et augmenté sa capacité à la rêverie. Ainsi, lorsque la femme dit à l’homme: « tu vois la poussière, là? », l’homme répond immanquablement: « Si tu gardes en mémoire que tu n’es que poussière, toute la terre sera tienne avec tous ses trésors! ». C’est scientifiquement prouvé, l’homme ne voit pas la poussière dans sa réalité grossière et prosaïque mais il saisit très bien sa signification symbolique ou esthétique, comme au temps jadis où il dessinait l’antilope sur les murs de Lascaux pour mieux la chasser. Ce pouvoir de transfiguration du champ visuel cro-magnon.1264939342.jpgmasculin explique aussi la raison pour laquelle l’homme n’est pas fait pour la vaisselle. 83,67% des assiettes ébréchées sont directement en lien avec cette capacité de l’homme à célébrer, voire chanter, toutes les étapes situées entre l’évier et le placard. Alléluia! Et souvent la femme, compatissante, intervient (« Laisse, je vais le faire moi-même »), admirative devant la fertilité imaginative de son descendant de chasseur-chaman. Ce don se vérifie aussi dans le test du musée. L’homme est capable d’apprécier des éléments dont il comprend la disposition dans l’espace et connait la signification dans le temps, comme les styles, les mouvements ou les écoles. En revanche, pour sa partenaire, le test du jugement esthétique est impitoyable. La femme ouvre les yeux. Consciente de la confusion de son champ visuel, elle regarde à droite, à gauche, en haut, en bas. Mais du coup, elle ne pense pas à regarder au milieu, là où généralement se trouve le pur chef-d’œuvre… Alors devant tant de preuves, peut-être faut-il cesser d’évoquer le sens du sacrifice ou de la responsabilité dans l’obstination de la femme à vouloir faire le ménage. C’est juste une question de champ visuel adapté à la dimension du territoire domestique. Mais il ne faut pas désespérer: maintenant que la femme sort de plus en plus de sa cuisine, son champ visuel va finir par s’affiner. Et un jour, il deviendra enfin l’égal de l’homme dans la compréhension de la culture et des arts. Disons dans quelques millénaires.

Cette sotie est totalement imaginaire bien évidemment. Que l’auteur veuille bien me pardonner ce détournement « oulipien » et la gent féminine la connotation « misogyne » qui pourrait ressortir de cet exercice. La solution, sans doute, est que l’homme et la femme regardent ensemble dans la même direction, leurs regards pourront alors se compléter et s’enrichir (ce que ne semble pas avoir compris les deux Cro-Magnons de l’illustration, mais l’espèce a du temps devant elle pour se parfaire…).

Illustration: anonyme

  1. nomade says:

    En attendant, depuis le début de la « libération de la femme », juridiquement consentie par les mâles du Palais-grotte-Bourbon, je me demande parfois si je n’ai pas droit personnellement plutôt que mon quartier d’auroch, durement chassé, au même regard d’évaluation de la taille et de la fraîcheur d’un morceau de viande.

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Patrick Corneau