kimslonaker.1210495923.jpgOn se souvient de la « vacherie » de Cioran à propos de Roland Barthes: « le critique à la mode, avec sa tête de veau ». En réécoutant dernièrement le sémiologue pontifier (et avec quelles profondeurs creuses!) sur la mini-jupe, m’est revenue cette remarque hautement perfide du désillusionné des Carpates dans le texte des Exercices d’admiration* qu’il consacre à Benjamin Fondane: “Il (B. Fondane) m’avait recommandé avec insistance le Shakespeare de Victor Hugo, livre à peu près illisible, et qui me fait penser au mot dont s’est servi récemment un critique américain pour qualifier le style de Tristes Tropiques: ‘the aristocracy of bombast’ – l’aristocratie de l’enflure. L’expression est frappante, bien qu’injuste en l’occurrence.”
Tout l’art de la griffe rentrée… Sans partager ce coup patte à Claude Lévi-Strauss, je ne suis pas loin aujourd’hui de ressentir ce que devinait Cioran sous l’allure bonhomme et la voix onctueuse de R.B.

* Gallimard, collection Arcades, 1986.

Illustration sonore: Entretiens de R. Barthes avec Georges Charbonnier enregistrés en mai 1967 (émission Mémorables, décembre 2002, France Culture)
Illustration: « Aristocracy », photographie de Kim Slonaker

  1. La différence entre Barthes et Cioran : l’un aimait la vie, le plaisir (du texte, celui du discours amoureux…), l’autre déversait sa bile en permanence, son encrier était malheureusement inépuisable.

    L’un est mort accidentellement, renversé en traversant une rue ; l’autre, prônant le suicide et psalmodiant dans ses oeuvres ennuyeuses l’inutilité de vivre, est mort tout à fait tranquillement dans son lit.

    La mythologie de Cioran n’est pas près d’exister : celle de Barthes a acquis une légère éternité.

    Le petit monde des mares se marre.

    Coa… coa… plouf! 😉 Bien dit! Je serai néanmoins plus mesuré sur ce que sera la postérité supposée de l’un et de l’autre (pour les générations qui nous succèderons).

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Patrick Corneau