« Les musées sont plein de croûtes » disait, je crois Picasso; et Bonnard: « Ce qu’il y a de mieux dans les musées, ce sont les fenêtres ».
Oui, je me suis souvent ennuyé dans les musées.

Musée d’art moderne de Rio de Janeiro, salles de peintures brésiliennes. Nous regardons avec un ennui à peine dissimulé les médiocres paysages de Pernambouco ou les vues de Rio d’artistes locaux dont les productions ne dépassent guère un niveau savoureusement artisanal. Toute cette peinture « rétinienne », à la fois appliquée et maladroite, délicieusement évocatrice de paysages disparus, exhale la douce mélancolie des choses mortes. L’œil se trouve alors narquoisement consolé par la vue qu’on embrasse depuis chaque fenêtre du musée sur la baie majestueuse et les profils fantastiques de la chaîne des Orgues. Soudainement la peinture se trouve disqualifiée par la lumière fluide et colorée qui, dehors, inonde en gloire l’atmosphère. Jamais la splendeur du monde n’avait si irrécusablement ravalé le geste pictural à ses insuffisances, à sa foncière inanité.

Illustration: photographie Daniel Machado

  1. solange says:

    je ne connais pas ce musée ; mais parfois oui, la splendeur du Monde, la grande splendeur, celle qui nous rend plus beau, plus juste. cette Splendeur qui parfois nous échappe, qu’on ne retrouve plus, qu’on appelle en silence.

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Patrick Corneau